Interview

Un outil pour les professionnel·le·s de l’accompagnement des personnes âgées en institution


Publié le

L'accompagnement des personnes âgées en institution est un défi à plusieurs niveaux. Tout d’abord pour les personnes âgées qui, en échange d'une sécurité et de différentes aides, doivent accepter de voir certaines de leurs libertés ou de leurs envies remises en question ; ou à l’inverse de trouver là un soutien pour réaliser des envies que la vie à domicile ne permettait plus. Ensuite pour les professionnel·le·s qui doivent simultanément les aider pour les actes de la vie quotidienne et réussir à leur proposer des activités significatives ou à recréer des liens, dans les limites des cadres légaux, administratifs ou financiers qui tendent à homogénéiser les pratiques.

Alexandre Lambelet

Alexandre Lambelet

Avec cet ouvrage, Alexandre Lambelet propose une synthèse tant des connaissances que de réflexions ou d’expériences menées aujourd’hui dans les EMS et devant permettre véritablement un accompagnement centré sur les personnes. Interview

 

En quoi cet outil sur « Le défi de l’accompagnement des personnes âgées en institution » est utile aux étudiant·e·s et professionnel·le·s qui travaillent dans le domaine de l’accompagnement des personnes âgées ? 

Depuis 20 ans, beaucoup de travaux, de réflexions et d’expérimentations autour d’approches centrées sur la personne sont menées en Suisse et à l’international. Si une large littérature scientifique existe à ce sujet, comme les projets menés dans les institutions sont nombreux, il manquait à mon sens une synthèse de ces savoirs qui serait accessible facilement aux professionnel·le·s qui travaillent auprès des personnes âgées en institution pour les soutenir dans leurs réflexions sur l’accompagnement qu’elles et ils entendent proposer. Abordant, entre autres thématiques, le cadre financier qui régit cet accompagnement, ce que l’on sait de l’entrée en lien avec les personnes atteintes de troubles cognitifs sévères, les outils à disposition pour redonner une place aux capacités des résident·e·s, l’ouvrage interroge chemin faisant la dimension politique de toute forme d’accompagnement et l’importance de s’intéresser à ce que vivent les résident·e·s si nous voulons imaginer d’autres possibles et éviter que les logiques institutionnelles s’imposent trop à celles et ceux qui y travaillent et y vivent. Avec de nombreux exemples issus d’observation en Suisse romande, je voudrais aussi rendre connues des pratiques qui me semblent particulièrement réussies et qui peuvent être d’autant plus inspirantes qu’elles sont déjà mises en place ici ou là. Cet ensemble d’éléments doit offrir, au final, des arguments aux professionnel·le·s qui veulent défendre, sur le lieu de travail, un accompagnement véritablement centré sur les personnes.   

« Avec de nombreux exemples issus d’observation en Suisse romande, je voudrais aussi rendre connues des pratiques qui me semblent particulièrement réussies et qui peuvent être d’autant plus inspirantes qu’elles sont déjà mises en place ici ou là. »

Quelles sont les pistes qui se dessinent pour revoir nos modèles d’accompagnement ? 

La recherche scientifique offre bien sûr des pistes, à travers des résultats probants quant aux effets bénéfiques ou négatifs de certaines formes d’accompagnement. L’ouvrage en rend compte. De même, des expériences magnifiques sont menées dans des EMS comme des réflexions admirables y sont développées. Il existe une intelligence collective dans les institutions qui se traduit par des pratiques concrètes dans l’accompagnement des résident·e·s et qui sont aussi valorisées dans cet ouvrage. Lorsque l’on est pris dans le quotidien de son travail,  il est parfois difficile de penser à d’autres possibles. Les exemples donnés dans ce livre peuvent être source d’inspiration. L’initiative d’un EMS de reprendre l’activité du bureau de poste de la commune qui va fermer n’est pas la panacée ; mais il questionne les frontières que veut se donner ou non l’institution, le rôle ou les contacts qu’elle veut proposer à ses résident·e·s, comme son souci de l’intégration de la population résidente (et de l’EMS) dans la vie du village.  

« Il existe une intelligence collective dans les institutions qui se traduit par des pratiques concrètes dans l’accompagnement des résident·e·s et qui sont aussi valorisées dans cet ouvrage. »

Comment le livre a-t-il été accueilli par les professionnel·le·s sur le terrain ? 

Le livre vient de sortir, les échos arrivent gentiment. Mais j’ai eu l’occasion de faire lire des étapes intermédiaires du manuscrit à différent·e·s professionnel·le·s afin de m’assurer de la pertinence du propos et j’ai à chaque fois été rassuré. C’est aussi que le domaine de l’accompagnement des personnes âgées, en particulier en institution, est, beaucoup plus que d’autres, très ouvert à l’échange, au dialogue, à la réflexion commune autour des pratiques à développer.  Il y a une vraie envie de collectiviser les savoirs, les expériences, afin de rendre l’accompagnement proposé toujours plus proche des besoins et des envies des résident·e·s, c’est-à-dire des personnes qui y vivent.