Mort et migration sous la loupe d’un travail de Bachelor


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Dans le cadre d’une conférence organisée par le Réseau Âge, vieillissements et fin de vie (AVIF) le 24 mai à 17h30, Leïla Geara et Maeva Nardin présenteront leur travail de Bachelor intitulé « Itinéraire post mortem du corps en Suisse romande. Intervention des actrices et des acteurs du champ funéraire en contexte migratoire et interculturel ». Les deux étudiantes en Travail social nous parlent de leur travail réalisé sous la direction de Mathys Cecilia, Doctorante au Laboratoire de recherche santé-social (LaReSS).

De gauche à droite : Maeva Nardin et Leïla Geara

De gauche à droite : Maeva Nardin et Leïla Geara

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur la thématique explorée dans votre travail de Bachelor ?   

Leïla : Notre travail de Bachelor consiste à comprendre comment le contexte suisse compose avec la diversité des pratiques mortuaires (culture, religion, communauté). Nous nous sommes vite rendues compte de l’importance de la collaboration entre les professionnel·le·s du funéraire, les différentes associations communautaires et religieuses, ainsi que les familles endeuilllées qui peuvent intervenir au moment du décès. Toutes ces actrices et acteurs se retrouvent dans une forme de négociation et de réajustement dans les pratiques funéraires pour respecter la part légale et les souhaits de ritualisation des défunt·e·s.   

Maeva : La question du COVID-19 a fortement impacté les pratiques. Les professionnel·le·s du funéraire ont dû trouver des manières de réhumaniser ces cérémonies qui se faisaient en huis clos et avec des réglementations strictes (pass covid, gestes barrières, etc.). Les personnes en situation de migration ont particulièrement été concernées dès lors qu’elles souhaitaient le rapatriement du corps, ce qui n’était pas un long chemin tranquille. Les questions de reconnaissance, de solidarité et de rapport interculturel sont des éléments qui nous guident aussi tout au long de notre recherche.   

« Les personnes en situation de migration ont particulièrement été concernées dès lors qu’elles souhaitaient le rapatriement du corps, ce qui n’était pas un long chemin tranquille. »

Pourquoi vous êtes-vous intéressées à la mort ?   

Maeva : Dans le cadre de nos études, j’ai suivi un module libre sur le deuil qui m’a beaucoup intéressée. Ce sujet m’était inconnu. J’étais intriguée à creuser la question plus en profondeur, d’autant que nous sommes toutes et tous confronté·e·s à la mort, que ce soit à titre individuel ou professionnel. Dans nos métiers, il est important d’être sensibilisé à cette thématique pour notre pratique future, où nous pourrions avoir un rôle à jouer dans le processus d’un deuil.   

Leïla : Notre intérêt d’approfondir ce sujet découle d’une vérité universelle ; un jour ou l’autre nous allons toutes et tous mourir. Et la mort est un sujet complexe à plusieurs niveaux: social, légal, culturel et administratif. Avant ce travail, je ne connaissais pas tous les intervenants et intervenantes qui sont impliqué·e·s suite à un décès. J’avais l’envie de sortir de ma zone de confort et de découvrir une thématique que je connaissais très peu.   

Comment s’est déroulée votre recherche ?   

Leïla : Nous avons réalisé dix entretiens sur le terrain avec des professionnel·le·s certifié·e·s, des associations de bénévoles et un représentant religieux. L’objectif était d’avoir une diversité d’intervenant·e.s pour tenter de répondre à une thématique vaste et ainsi pouvoir explorer les aspects légaux, religieux, culturels et du savoir-faire sur le terrain.   

Maeva : Notre recherche s’est déroulée en trois temps, dictée par le processus de recherche scientifique. Dans un premier temps, nous nous sommes documentées sur le sujet par le biais de la littérature scientifique, ce qui nous a permis de déterminer nos questions de recherches et nos objectifs. Puis nous sommes allées récolter les données sur le terrain par le biais d’entretiens avec des professionnel·le·s mais aussi par une présence à des formations. Pour finir nous avons fait dialoguer toutes les informations en notre possession pour tirer nos propres conclusions.   

« L’objectif était d’avoir une diversité d’intervenant·e·s pour tenter de répondre à une thématique vaste et ainsi pouvoir explorer les aspects légaux, religieux, culturels et du savoir-faire sur le terrain. »

Qu’est-ce qui vous a le plus marquées durant votre travail de Bachelor?   

Maeva : Nous avons eu l’opportunité de suivre des agent·e·s funéraires durant une journée. Je n’avais jamais été confrontée de si près à la mort. Je retiens particulièrement la bienveillance et le professionnalisme de ces actrices et acteurs dans le contexte funéraire. Toutes et tous mettent un point d’honneur pour que les volontés du défunt·e ainsi que celles de la famille soit respectées. Après cette journée, j’avais presque envie d’en faire mon métier !   

Leïla : On voit que derrière les souhaits de ritualisation d’une personne, il y a un statut social, des croyances culturelles. La mort n’est pas indépendante de la vie, c’est un continuum. Le lien avec la migration a fait sortir des enjeux auxquels on ne pense pas si on n’est pas confronté à ces questions. J’ai été particulièrement marquée par la la solidarité dont font preuve certaines et certains volontaires issus de la migration et le besoin de reconnaissance des associations. Notre société Suisse étant majoritairement chrétienne et laïque, il existe un besoin de reconnaissance juridique et social pour les pratiques funéraires des minorités religieuses et communautaires, les différentes communautés se rejoignent pour être plus fortes et faire entendre leur voix. C’est une belle leçon d’humanité. La place données aux personnes migrantes dans la mort peut aussi impacter la place donnée aux vivants.

 

Les futurs rêvés des morts en migration

Conférence

Dates de l'événementMercredi 24 mai 2023 de Heures de l'événement 17h30 à 19h