Cette recherche, menée principalement au Cameroun, part du postulat que le football est beaucoup plus qu’un sport en Afrique : une véritable institution sociale qui ouvre aux pratiquant·e·s l’accès des ressources matérielles, à des réseaux et à une reconnaissance non négligeable. Qu’en est-il alors des footballeuses qui s’y engagent à leur tour ? Cette recherche qui s’est terminée en février dernier, a pu y répondre, en mobilisant des méthodologies originales et collaboratives, au cœur desquelles se trouvent footballeuses et coaches.
En particulier, le digital storytelling été utilisé, en tant que méthodologie participative. Il s’agit d’un media audiovisuel qui donne aux narratrices la possibilité de parler d’elles-mêmes, par le récit d’une histoire racontée à la première personne, associée à des images. Cette méthode a donné lieu à la création de six portraits vidéo de footballeuses et d’une jeune chercheuse :
- Une histoire de coaches et de confiance
- Le talent que Dieu m'a donné
- Reconversion d’un rêve
- Dieu m’a pris une et m’a donnée plusieurs
- Une paire de gants
- Rendre nos rêves réels
- La force de dire non
Un documentaire (réalisé par Sarah Imsand) est également en cours de production (sortie prévue en 2024). Il est consacré à l’engagement de deux footballeuses dans les différents lieux qui font leur quotidien : les terrains de terre sableuse, parsemé de trous, sur lesquels elles jouent, le petit appartement où les maillots sèchent dans la cuisine ou encore le salon de coiffure où elles font tresser leurs cheveux.
La collaboration s’est prolongée jusqu’à la restitution des résultats, à Yaoundé, lors d’un colloque final qui s’est tenu à l’UCAC (Université Catholique d’Afrique Centrale) en février de cette année. Colloque qui a invité joueuses et coaches à participer activement aux tables rondes pour discuter des thématiques abordées dans la recherche. Aux tables rondes s’est ajoutée la présentation publique des histoires digitales en présence de la plupart des sept narratrices, qui ont pu dialoguer directement avec des représentant·es des sphères académiques et institutionnelles au sujet de leurs parcours.
Pour le dire très rapidement, en travaillant avec plusieurs équipes et des joueuses de générations différentes, l’équipe de recherche (suisso camerounaise) a pu mettre en avant que le football féminin au Cameroun est d’abord et principalement le fait de l’engagement des joueuses elles-mêmes, qui tiennent bon face aux discriminations et autres comportements hostiles, faits de jugements sexistes et de harcèlements, et souvent sans grand soutien des institutions, contrairement à ce que l’on pourrait penser en cette période de médiatisation du football féminin.