La pandémie de COVID-19 et les mesures de restrictions qui s’en sont suivies ont produit et renforcé les inégalités en Suisse en un temps record. Dès le printemps 2020, de nombreuses études ont mis en évidence les dynamiques inégalitaires à l’œuvre.
D’un côté, les personnes bénéficiant de postes stables sur le marché du travail ont plus souvent pu télétravailler, elles ont moins souvent perdu leur emploi ou été confrontées à une baisse de revenu. Parmi les plus hauts revenus appartenant à cette catégorie, certains ménages ont même vu leur épargne augmenter de par la baisse de certaines dépenses en lien avec la mobilité, les activités et loisirs (restaurants, sports, vacances, etc.).
Parallèlement, les travailleur·euse·s précaires ne bénéficiant pas de la même stabilité (contrats à durée déterminée, travail sur appel, petits et faux indépendants) ont plus souvent été confrontés à une perte de leur emploi (en particulier dans les secteurs de l’économie domestique, de l’hôtellerie et de la restauration) et à une diminution de leur revenu, y compris parmi celles et ceux ayant conservé leur activité. Ces mêmes personnes ont ainsi dû plus régulièrement piocher dans leurs éventuelles économies et à défaut, s’endetter.
Derrière ces deux tendances rapidement esquissées se dessinent les bases d’un processus de dualisation de la société qui questionne les effets du COVID-19 sur les inégalités à plus long terme.
Ce constat questionne également la capacité des dispositifs sociaux à endiguer ces inégalités. Certaines aides ont été rendues possibles ou facilitées dans un laps de temps inédit, à l’image des mesures de RHT de l’assurance chômage ou des APG COVID, révélant une réactivité sous-estimée des politiques sociales Suisse.
Toutefois, on s’est aperçu dans le même temps que l’accès aux prestations sociales n’était pas toujours simple, en raison du manque d’information, mais aussi de la non-éligibilité, voire de non-recours à celles-ci. Les inégalités d’accès à la protection sociale sont ainsi venues se surajouter aux inégalités présentes sur le marché du travail, renforçant l’effet de dualisation décrit plus haut.
L’expérience de la Centrale des solidarités, mise en place durant la pandémie par le Département de la santé et de l’action sociale, avec l’appui de l’Association vaudoise d’aide et de soins à domicile (AVASAD), pour soutenir les personnes vulnérables dans cette période de crise atteste de ces tendances. Ce nouveau dispositif a permis de répondre à des problématiques d’isolement, mais aussi d’orientation sociale dans le dispositif sociosanitaire. Parmi les publics particulièrement affectés par la pandémie, on retrouve les familles monoparentales, les jeunes en formation ainsi que les personnes âgées isolées, qui connaissent par ailleurs un risque de pauvreté plus élevé que la moyenne suisse.