Une nouvelle doxa : l'investissement social

L'"investissement social". En première analyse, c'est un oxymore. Une tradition bien établie présente en effet les politiques sociales comme génératrices de dépenses uniquement : la presse et les politiques parlent toujours de "déficits", voire de "trou" de la sécurité sociale et les scientifiques ne font souvent pas différemment. Comment le social pourrait-il donc être un investissement ? En seconde analyse, un étonnement. Pourquoi et par qui la rhétorique de l'"investissement" social se répand-elle depuis quelques années ? Sur quelle anthropologie de l'humain s'appuie-t-elle ?

Cette article propose des éléments de réponse à ces questions. Il est organisé en trois parties. Dans une première partie, Jean-Pierre Tabin va réfléchir à l'origine de l'Etat social afin de montrer que ses fonctions sont multiples et que parler à son propos en termes comptables (dépenses versus investissements) est très problématique. Dans une deuxième partie, l'auteur va s'interroger sur la manière dont l'idée d'investissement social a été construite et diffusée. La troisième partie montre à partir d'une analyse des débats sur la 4e révision de l'assurance chômage suisse les effets concrets de cette nouvelle doxa. L'auteur conclura en examinant les conséquences d'une posture financière sur les politiques sociales.

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Références

Tabin, J.-P. (2017). Une nouvelle doxa : l'investissement social. In J.-M. Bonvin & S. Dahmen (Dir.), Reformieren durch investieren, Chancen und Grenzen der Sozialinvestitionsstaat in der Schweiz – Investir dans la protection sociale, atouts et limites pour la Suisse (pp. 93-107). Zurich : Seismo.