Les enjeux de l'amitié entre filles

Cet article rend compte d’une analyse effectuée sur la base d’entretiens collectifs et de sociogrammes concernant une douzaine de filles âgées de 9 à 11 ans, fréquentant un lieu d’accueil pour écoliers et écolières en milieu scolaire (APEMS) situé dans un quartier populaire de Lausanne. Privilégiant la perspective de l’enfant acteur, les auteures ont pris l’option d’analyser les catégories de l’amitié telles qu’elles sont définies par les filles elles-mêmes. Les représentations enfantines de l’amitié s’articulent autour de trois axes majeurs : la hiérarchisation des relations, les phénomènes de la trahison et du dénigrement. En effet, les trois catégories de l’amitié rendent compte d’enjeux importants pour les filles et en particulier la soumission à un ensemble de règles afin de se prémunir contre le risque d’isolement. Les chercheuses arrivent à la conclusion que l’amitié constitue une pratique en soi, dans la mesure où elle prend du temps et où l’engagement affectif n’est pas médiatisé par une activité organisée. L’intégration de ces filles dans un cercle amical n’est ainsi jamais assurée en dépit ou à cause d’un engagement émotionnel fort. De plus, les rapports de force établis au sein du groupe étudié témoignent non seulement d’une concurrence entre filles, mais aussi d’une soumission à un ordre hétéronormatif activant des stéréotypes de sexe (l’émotion et la relation chez les filles). Pour les auteures, ce constat relance la question de la réduction des inégalités dans le cadre du travail social. En effet, les filles sont peu présentes dans les loisirs organisés, hors de la structure d’accueil, alors que cela pourrait constituer une opportunité d’élaboration de relations affectives et amicales médiatisées par une activité partagée et donc moins centrée sur l’émotion.

Résumé : Anne-Line Schminke

Auteur·e·s
Références

Golay, D. & Malatesta, D. (2011). Les enjeux de l'amitié entre filles. Actualité Sociale, 34, 13-14.