Du travail prescrit au travail réel : l'intelligence du métier ou la danse balinaise des EPE

Il existe une distinction importante entre le travail prescrit et le travail réel, le premier étant compris comme « ce qu'il faut faire » et le second comme « ce qui est réellement fait ».

Cet article propose de réfléchir à cette distinction et surtout à la manière dont le travail, ici celui des éducatrices de la petite enfance (EPE), est en constante construction. Le travail réellement effectué est de l'ordre de la subjectivité : les individus ne sont jamais totalement des exécutants et intègrent des dimensions personnelles dans leur activité.

L'activité non réalisée parce que difficile, voire impossible, fait aussi partie du travail réel. Afin de parvenir à réaliser ce qui est attendu en dépit de cela, les personnes ont recours à la catachrèse, c'est-à-dire au détournement de la fonction première d'un outil pour parvenir à accomplir une tâche. La transgression entre dans le registre de la création professionnelle, elle est individuelle au départ puis passe par un processus de validation par le collectif. Pour illustrer cette conception, Robert Frund donne l'exemple d'EPE qui, confrontées aux pleurs généralisés des enfants qui s'influencent mutuellement, choisissent de se mettre en rang au milieu de ceux-ci et d'effectuer une danse hypnotique, qualifiée de « danse balinaise ». Ce procédé non dénué d'humour et qui a l'avantage de faire arrêter les enfants de pleurer, d'abord inventé personnellement, a ensuite été validé par le groupe qui l'utilise, démontrant ainsi l'intelligence du métier qu'ont ces éducatrices.

Résumé : Sarah Kiani

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Références

Frund, R. (2006). Du travail prescrit au travail réel : l'intelligence du métier ou la danse balinaise des EPE. Revue [petite] enfance, 96, 17-22.